jeudi 18 octobre 2018

impression spontanée





L'inspiration est un mystère, une bête sauvage m'a dit une ancienne étudiante, c'est une inéquation entre soi et le monde. L'inspiration est métaphysique comme les Muses sont mythologiques, celles-ci sont filles d'un Dieu et filles de la mémoire. Les Muses sont les Filles de la Mémoire. Rien de moins... Dans l'aube bouffie, je suis encore tout plein d'une nuit inutile. À supposer que les Muses viennent la nuit, elles me font fausse route depuis quelques temps déjà. Je dois chercher les mythes ailleurs. Je me réveille et me désaveugle. Jour de grand froid, soleil enchevêtré dans les feuilles rouillées des arbres, les branches dansent décharnées. J'ai la poitrine crispée, les mains moites et les jambes boitent, et la peau du visage en lambeaux. Hypnose du fumet du café, je m'installe dans mon espace, dans mon nouveau lieu. J'y avance comme dans un labyrinthe, le même à chaque fois. Les premiers pas sont simples, comme rarement auparavant, j'en connais les premiers détours, j'ai plus de repères que je n'en ai jamais eus. Certes, l'inconnu est toujours là, mais il murmure et s'essouffle, et l'écho de mes appels s'étiole en silence. J'habite un nouveau lieu, un nouvel espace. J'ai quitté ma boîte à chaussures. Là-bas, pendant un an sur deux, j'en aurai braillé de la poésie tuseul devant des murs vierges mais maculés d'indifférence. Des poèmes écrits à l'encre d'alcools lointains, à s'écharder genoux et poings dans le fond du baril gratté, à quatre pattes dans les eaux froides de sentiments pas toujours beaux à regarder, à tailler vainement des vers à même l'opacité des brumes troubles. Je me retourne et relis et tente de relier le tout, pattes de mouches de l'écriture pognées dans la toile du texte, élongation des cursives et cheminement du phrasé, errances occasionnelles dans les ivresses décompensées, circonvolutions courbes et crochets des lettres typographiées ; je m'y prends mal, je recule dans mes souvenirs pour essayer d'avancer, et pourtant, ceux-ci ont revêtu de nouveaux visages que je ne reconnais plus. Tant de face à face avortés. Juste des quintessence de poussières... Le deuil des peaux mortes est fini même s'il continue de s'écrire dans ma face, et je pense que tout est plus clair, si bien que les reliefs, les contours et les détails se font discrets, plus imperceptibles, me laissant devant de nouveaux murs blancs plus dénués qu'avant. J'habite un nouveau lieu, un nouvel espace - vieil appartement à l'âme latente, les essentiels désordres somnolent et j'entends le chaos ronfler, les premiers repères sont les mêmes mais le centre du labyrinthe s'est désaxé - où une nouvelle poésie est à naître, que j'espère plus belle, plus précise, où un nouveau nous est en train de se former. 



























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