mercredi 19 février 2014

Pause

Tout défile. Je marche et rien n'arrête mon regard. Dans la nuit qui se lève les flaques d'eau au sol sont sans reflet. Des personnes aux visages mats marchent et filent, pressés. J'ai lu le manuscrit de Francis aujourd'hui et j'ai trouvé ça beau. Inspirant. Il m'a donné envie d'écrire. J'espère qu'il me lira. Mais en attendant je m'évertue à fixer mon regard sur le mouvement ambiant. Échec, splendeur et misère de l'échec. Une sorte de bleu. Quoi boire? Une prémisse de l'Écosse à venir. Qu'écrire? Rien. Toujours rien. 
Que l'inutile
Que le vide vespéral noyé de nuit 
Que les détails invisibles des formes des formes
Que le son magique de la trompette de Miles
Que l'extraordinaire chaleur d'un whisky fait y'a 15 ans
Que l'encre que boit ma feuille assoiffée
Que mon pauvre esprit ne sait étancher
Que ma solitude de février
Que l'incomplétude des choses...
Le temps défile et déploie sa vacuité. J'ai lu quatre romans en dix jours et rien ne se remplit. Lumières n'éclairant rien. S'écoule la cire d'une chandelle dont le parfum de vanille s'essouffle. L'encre fait ses offrandes en vain et se heurte à l'accident. Crevaison. Blue in green de Miles Davis. Je suis entouré de meubles de bois vivants plus vieux que moi, qui parle et dise plus que moi. Et je n'entends rien. Sourd, beaucoup de choses se sont perdues en moi, ma mémoire et mes rêves dans des pages déchirées, dans les fonds des verres vidés. Sur le bord d'une rue dont j'oublie le nom, à l'intersection du souvenir et de la création, une passante a passé. Modalité de l'image. Insondable dans l'ombre, dehors d'atteinte, elle avait une beauté impossible. Elle a passé et est sortie de ma vie.

lundi 10 février 2014

errances dans mes îles

j'avance le long du fleuve brisé
ce fleuve brillant de lave glaciale

mon inspiration stérile est prise
ma respiration s'immobilise
j'avance sans pas

saisir ce vide que le regard
n'arrive pas à remplir

sous les glaces s'écoulent
furieuses
les eaux vives
comme sous ma peau mon sang
viole mon désespoir

il rage aujourd'hui en cet été de l'hiver

j'avance à ne plus me perdre
dans les fêlures du vent

la plaine souffle sur moi son froid
l'effroi me frôle et
mes errances éclatent
en formidables déroutes

lorsque le soleil videra la ciel
je continuerai d'observer les absences
face aux voluptés des obstacles

dans le calme effrayant
du temps qui se défait
mes îles se composent