mardi 27 mars 2012

Au midi

Après une semaine surchauffée, le soleil en son midi refroidissait les ardeurs du printemps.  Un homme, peu inspiré, alla traîner sa solitude dans un parc voisin, trou vert dans une ville faussement tranquille. Il vit un homme là-bas, tout de noir vêtu, avec un masque et une batte de baseball à la main, frapper dans l'air des balles invisibles, entre des pas de danse ridicules. La folie est souvent plus proche qu'on ne le croit. Le fou répéta ce manège pendant une longue demi-heure. 
Plus l'homme marchait et plus se dévoilait autour de lui le caractère profondément illusoire de l'isolement qu'il était venu chercher. Certes, au regard le parc était paisible : il y avait ici et là quelques passants, les habituels joggers et d'autres qui jouaient avec leur chien dans une indifférence béate. Mais petit à petit, l'homme se rendit compte de la marée sonore qui montait autour de lui. Deux avions passèrent coup sur coup et chargèrent le bleu du ciel d'un tonnerre mécanique, le bruit des travaux du quartier avoisinant  grondait en modulations amélodiques, et ce qui le frappa le plus fut l'extraordinaire cacophonie exponentielle et inlassable, comme une avalanche ascendante, de goélands surexcités s'entredéchirant l'ouïe à qui mieux-mieux, insouciance animale, et évoquant vaguement les échos des discours discordants de ce printemps mouvementé. Les cris confrontés aux sourdes oreilles, les idéologies sorties de l'hibernation, s'élevant et s'entrechoquant dans les fracas des différences.
Tranquillement assis devant l'étang, près des berges de quenouilles jaunies, l'homme se coupa du son qui l'entourait, tenta de s'isoler complètement et finalement n'entendit que le bruit de petites pattes dans les feuillemortes, accompagné du doux roucoulement des pigeons. Il fixa l'eau longtemps, se leva puis partit. Rien dans les poches, sans réfléchir, aucune pensée, mais reposé.

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