jeudi 8 novembre 2012

On a trane

Alors que je m'enfonce dans la fourmilière souterraine, dans les artères bouchées du métro, le maître souffleur, the master blower Johnny Johnny Johnny Coltrane!!! s'époumone toute fureur dans son sax dans mes oreilles. C'est un amour suprême qui rythme ce retour à la maison qui semble déjà plus vivant.  L'heure de pointe est passée, tous se sont tirés. La soirée est bien commencée. Dans le wagon en face, le dernier, un rouquin impossible d'environ seize ans, avec des broches, embrasse sa copine comme c'est pas permis, il lui maltraite le goulot à en donner des envies à un alcoolique repenti. Ils sont seuls, ils ont l'air bien. J'ai soudainement la gorge sèche. Le Trane devait avoir la gorge sèche à souffler dans son sax comme ça. Cette musique m'inspire des lampadaires dans une ruelle de soir d'heure reculée, une ruelle silencieuse où des ombres se meuvent sans but. Trois stations plus tard, deux lancinantes lesbiennes se frôlent les mains et se dévorent des yeux. L'électricité est palpable. A love supreme. Elles débarquent du train à la station suivante. Ô lascives lesbiennes! Je ne peux m'empêcher de sourire dans ma tête. Y'a-t-il pleine lune dehors? Hmm, ça doit être Coltrane. Cette parenthèse d'urbanité prend un sens différent, plus intéressant dirais-je, lorsqu'on la considère avec de la musique. Une fois sorti, il fait totalement nuit. La lumière des lampadaires est granuleuse, une lumière à gros grains comme dans Eyes wide shut de Kubrick. J'ai les yeux pourtant bien ouverts. Et tandis que je marche, la lumière ne s'estompe pas sur le trottoir mouillé et son reflet ne diminue pas sur le sax de Trane. 
A love supreme, a love supreme...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire